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10.10.2022

En croissance, l’Allemagne montre ses muscles… à l’export !

Dévoilés le mois dernier par VdDK (Association allemande de l’industrie des meubles de cuisine), les résultats – très encourageants compte tenu du contexte – affichés à fin juillet 2022 par les fabricants d’outre-Rhin témoignent de la robustesse de cette industrie référente sur le « Vieux Continent » ; laquelle montre, toujours et encore, une belle appétence pour les différents marchés européens (au premier rang desquels la France) et mise de plus en plus sur l’export pour soutenir sa croissance.

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Les chiffres sont des plus éloquents et ne souffrent aucune contestation ; atteignant, à fin juillet 2022, un total de 3,62 milliards d’euros, le chiffre d’affaires réalisée par l’industrie allemande de meubles de cuisine a affiché, selon vdDK, une croissance de 10,11 % par rapport à la même date l’an passé, soutenue entre autres par des carnets de commande toujours bien remplis ainsi que des prix plus élevés qu’en 2021. Au regard du contexte macroéconomique actuel pour le moins délicat, cette performance doit d’ailleurs être saluée, et rassure les fabricants d’outre-Rhin quant aux perspectives d’avenir… à court terme, si l’on en croit Jan Kurth, directeur de VdDK :

Pour l’ensemble de la branche, nous nous attendons – malgré tous les aléas actuels – à une croissance allant jusqu’à 10 % sur l’ensemble de l’année 2022.

Marché des meubles de cuisine : un petit « miracle économique » en Allemagne ?

On ne s’attardera pas trop à décrire lesdits aléas, bien connus de tous à présent : une inflation qui a atteint 10 % en septembre dernier (un pourcentage enregistré pour la dernière fois… en 1951 !), la hausse presque exponentielle des coûts de l’énergie et des matières premières, une « supply chain » toujours perturbée, des ménages qui réduisent de manière sensible leur consommation, de crainte que les factures énergétiques n’explosent cet hiver, etc.

De fait, ce contexte perturbé « paralyse l’économie [allemande] », selon Guido Baldi, de l’institut économique d’outre-Rhin (DIW), cité dans un article de Ouest France en date du 09 octobre ; le papier en question précise par ailleurs que « les instituts économiques prévoient une croissance en baisse sur l’ensemble de l’année 2023 à – 0,4 %. »

Et notre confrère de donner également la parole à Jörg Hinze, de l’institut d’économie mondial de Hambourg (HWWI) : « L’Allemagne a traditionnellement une économie qui se base beaucoup sur son industrie. Celle-ci nécessite beaucoup d’énergie, notamment venue de Russie. Quand la demande internationale était forte, l’Allemagne pouvait ainsi importer de l’énergie bon marché et vendre des produits industriels à l’export. Mais ces avantages passés deviennent des inconvénients dans la situation de crise actuelle. (…) Des secteurs industriels stratégiques comme la chimie, l’automobile, l’acier subissent une très forte pression : l’augmentation des prix de l’énergie va freiner leur compétitivité au niveau international. »

Industrie allemande
Site de production Schüller, Herrieden (Bavière). Le fabricant a signé un CA de 197 millions d’euros à l’export en 2021 (contre 149,5 millions d’euros en 2020), soit une progression de 31,8 %, en grande partie réalisée grâce aux pays européens et aux marchés d’outre-mer. On rappellera à ce titre que, selon notre confrère culturecuisine-lemag.com, Schüller France « a progressé constamment pour occuper aujourd’hui le deuxième rang des fabricants allemands dans l’Hexagone. »

Un témoignage fort intéressant, qui illustre notamment que, à rebours des secteurs précédemment cités, l’industrie allemande de meubles de cuisine connaît actuellement un petit « miracle économique » puisque, non contente d’afficher une croissance générale particulièrement robuste, elle superforme à l’export ! Jugez plutôt : un CA de 1,63 milliard d’euros à fin juillet 2022, en croissance de 11,21 % par rapport à N-1, et qui représente désormais près de 45 % du résultat total réalisé par la filière ! Rien de moins qu’exceptionnel, ce résultat a ainsi soulevé l’enthousiasme de Stefan Waldenmaier, président du directoire de VdDK :

La poursuite de l’évolution conjoncturelle de l’industrie allemande du meuble de cuisine doit donc à l’avenir être encore plus soutenue par l’exportation, car les cuisines « Made in Germany » peuvent très bien marquer des points dans ce domaine.

Un excédent commercial en constante progression

Moins gourmande en énergie et donc plus robuste, dans le contexte actuel, que les secteurs de la chimie, de l’automobile ou de l’acier, l’industrie allemande des meubles de cuisine ne fait donc pas mystère de ses ambitions à l’export ! On la comprend, du reste, lorsque l’on prend connaissance, dans le détail, des chiffres : les entrées de commande en provenance de l’étranger ont ainsi augmenté de 13,84 % au premier trimestre 2022, de 16,26 % au second trimestre, et de 13 % en juillet et en août.

Fort de ces résultats, le solde du commerce extérieur devient un peu plus excédentaire à mesure que les années passent : après avoir augmenté de 25,7 % de 2020 à 2021, il affiche, à fin juillet 2022, une nouvelle progression de 11,9 %, et dépasse désormais 1,5 milliard d’euros.

Industrie allemande
Chez nobilia, les exportations ont dépassé, pour la première fois dans l’histoire de l’entreprise, les ventes sur le marché allemand en 2021 ; ainsi représentaient-elles 53,1 % du CA de l’industriel, contre 48,1 % en 2020 ; on précisera incidemment que la France constitue le premier marché à l’export du fabricant.

Comment l’expliquer ? D’une part, les principaux pays importateurs de cuisines allemandes sont en progression. Dans l’ordre (07/2022 vs 07/2021) : la France (+ 4,1 %), les Pays-Bas (+ 23,3 %), l’Autriche (+ 20 %), la Belgique (+ 6,9 %), la Suisse (+0,6 %), le Royaume-Uni (+ 15,4 %) et l’Espagne (+ 21,5 %). Seule la Chine, désormais 8e au classement, affiche une baisse de 24 % par rapport à l’an passé… ce que l’on comprend aisément au regard de la politique zéro Covid très restrictive encore en vigueur dans le pays.

D’autre part, les importations de meubles de cuisine en Allemagne demeurent faibles par rapport aux exportations. À titre d’exemple, les deux pays qui exportent le plus dans le pays de Goethe, soit l’Italie (+ 154 % entre juillet 2020 et juillet 2022) et la Pologne (+ 80 % entre juillet 2020 et juillet 2022), affichent un CA cumulé outre-Rhin équivalent à celui que l’Allemagne réalise… en Espagne !

Incidemment, on peut formuler deux observations à la lecture de ces chiffres :

  1. Absente du top 8 des principaux pays importateurs de cuisines allemandes, l’Italie constitue encore, à l’heure où nous écrivons ces lignes, un marché très hermétique et sans doute assez saturé en termes d’offre « locale », donc difficile à pénétrer pour tous les acteurs étrangers.
  2. Si la France demeure le premier client de l’Allemagne, la progression de ses importations est moins, voire beaucoup moins importante que celle des autres pays intégrés au classement… à l’exception de la Suisse.

L’Allemagne met tout en oeuvre pour préserver sa compétitivité

Quid des perspectives de développement à court et moyen terme ? Le VdDK, qui a constaté, en juin et en juillet, des baisses de CA de 0,05 % et de 5,45 %, évoque, entre autres, un éventuel ralentissement de la conjoncture ; un tassement que le syndicat explique en évoquant les appétences soudaines des ménages pour l’épargne, afin de se prémunir contre les tendances inflationnistes actuelles en matière d’énergie et de denrées alimentaires.

Malgré ce constat, le VdDK table, nous l’avons vu, sur une progression totale du CA de la filière en 2022 flirtant avec les 10 %. Cela ne l’empêche pas, toutefois, d’être très attentif aux difficultés actuelles et de tout mettre en oeuvre pour préserver la compétitivité du secteur. En témoigne sa démarche récemment entreprise auprès de la présidente du groupe parlementaire Bündnis 90/Die Grünen, Madame Britta Haßelmann, et du ministère fédéral de l’Économie, à qui le VdDK a demandé à bénéficier de « mesures de compensation dans le secteur de l’énergie, car l’évolution des coûts représente également une menace existentielle pour nos entreprises. » L’Association souligne également la « nécessité vitale de répercuter les coûts de production croissants dans la chaîne, afin de ne pas mettre en danger nos entreprises. »

Autre constat important, l’allongement des délais de livraison, sur le marché domestique comme à l’export : « Près de la moitié de nos entreprises table désormais sur des délais de livraison de plus de dix semaines, les autres prévoyant des délais allant jusqu’à huit semaines ; seul un cinquième est en mesure de livrer en quatre semaines. »

Industrie allemande
Häcker Küchen possède sa propre flotte de camions : une bénédiction en cette période où certains industriels bataillent ferme pour trouver des transporteurs et atténuer autant que faire se peut l’allongement des délais de livraison.

Enfin, le VdDK demande une certaine parité concurentielle au niveau européen pour tout ce qui a trait au développement durable : « La protection des ressources, le changement climatique, l’empreinte carbone ou la recyclabilité sont étroitement liés à l’économie circulaire, dont la mise en œuvre a fait l’objet de grands progrès normatifs au niveau du CEN par l’intermédiaire de la fédération européenne FEIC. S’ils peuvent paraître abstraits, lesdits progrès ont cependant une incidence énorme sur notre compétitivité, car leur mise en œuvre, très importante pour la société, entraîne des coûts pour nos entreprises. Il est donc impératif que tous les acteurs du marché soient soumis aux mêmes conditions dans toute l’Europe. »

Les États-Unis, futur eldorado à l’export pour l’Allemagne ?

Néanmoins, tout cela n’empêche pas le VdDK de se montrer confiant quant à l’avenir, ainsi que l’explique Stefan Waldenmaier :

Les années 2023 et 2024 seront exigeantes et difficiles, et la bonne santé de notre secteur ne dépendra pas uniquement des coûts et de l’évolution des chiffres clés de l’économie nationale. La perception mentale du consommateur sera également déterminante : si les acteurs politiques et les médias envoient des signaux positifs, celui-ci se sentira encouragé, ce qui profitera à la demande… et donc à nos entreprises. Indépendamment de cela, les exportations vers des marchés clés comme les États-Unis contribueront largement à notre succès dans les années à venir. Et un dollar fort nous rend en outre plus attractifs en termes de prix. C’est pourquoi je suis globalement optimiste et confiant pour l’industrie allemande du meuble de cuisine !

Voilà qui est dit !

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